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de la poésie scientifique

concrétant en concepts philosophiques et sociaux, le « Symbolisme », de par son essence toute émotive, se soit scindé en autant de modes, mais tous également inaptes aux généralisations, que lui imposaient de vibrants tempéraments. Et est-ce généralement par des apports de technique que ces poètes surgirent, de valeur capitale.


Or, la première interprétation dissidente vint, disons-nous, de M. Jean Moréas et dès 1886. En l’art de Moréas, à cette heure, venaient valeureusement s’unir, et la manière prosodique de Verlaine, devenue en lui plus complexe et mieux déterminée, et la pensée de Mallarmé, avec souvenir de Baudelaire de qui d’ailleurs Mallarmé avait procédé aussi, initialement. Moréas paraphrasait ainsi : « L’idée ne doit point se laisser voir privée des analogies extérieures : car le caractère essentiel de l’art Symbolique consiste à ne jamais aller jusqu’à la conception de l’idée en soi. » C’était redire que l’idée devait demeurer en valeur d’image.

Comme l’art de Verlaine, celui de M. Jean Moréas, tout en la brisant, ne concevait point pour le Rythme d’autre mesure que « l’ancienne métrique, avivée, disait-il : un désordre savamment ordonné, la rime illuescente et martelée auprès de la rime aux fluidités abscondes, l’alexandrin à arrêts multiples et mobiles, l’emploi de certains nombres impairs. » Ainsi, à travers Mallarmé et Verlaine, et Ronsard, Moréas me semble avoir préparé les voies au « Vers libre » dont M. Gustave Kahn allait être le théoricien.


Or, deux nouveaux poètes étaient apparus, aux côtés de Mallarmé. Nous parlerons plus tard de l’un d’eux, M. Francis Viélé-Griffin, en même temps que de M. Émile Verhae-