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de la poésie scientifique

et son arrivisme, d’une soi-disant loi scientifique : la loi du moindre-effort.

Pensée misérable. Car, si, dans le phénomène universel, dans le processus vital, nous constatons que tout organisme tende, par adaptation, à accomplir avec le moins de résistance possible, son acte, — veut-on en même temps concevoir quel long, quel patient, quel tenace et total effort, cette adaptation a demandé ? Mais veut-on aussi ne pas prendre pour la loi le résultat ainsi acquis momentanément, l’impossible moment d’arrêt et d’équilibre qu’est ce résultat, tandis que tout évolue autour de l’organisme que nous considérons, qui, immédiatement, devra, en nouvelle instabilité, évoluer lui aussi, — sous peine de diminution et de mort, — et retendre son effort, son plus-d’effort…

La loi du monde, la loi de la pensée, est la loi évolutive du Plus-d’effort… Et en morale, et en sociologie, comme en art, il sied de le répéter de toute notre intelligence et de toute notre âme : car cette théorie amorale du moindre-effort, si elle venait vénéneusement à vivre, ce serait la perte ricanante de l’individu, et la ruine putride des sociétés !


Nous mesurons ainsi la valeur humaine individuelle :

La Matière, la Vie, tendent à se conserver (Instinct de conservation). C’est l’instinct primordial et nécessaire, retrouvé aux phénomènes les plus complexes.

— Cette loi de la Vie l’incite à tenter de se connaître davantage et sans cesse (Évolution), pour se perpétuer au Mieux.

— En concordance avec le Tout, tout homme doit donc s’évertuer en le plus-d’effort, à connaître l’univers et lui--