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raine. Il examine, en désordre souvent, les états sociaux des humains, l’origine des sociétés et des Gouvernements, la propriété, le mariage, les gens d’Église. Il parle de haut, selon la Nature, ou violemment attaque et meurtrit. En science pure, il traite des erreurs des sens, à propos des miroirs, des visions et de la sorcellerie. En philosophie et en morale, il oppose à la prescience divine la volonté de l’homme, son droit à déterminer ses actes, et il étudie la place de l’homme dans la nature… Mais, là où il nous apparaît surtout, et grandement, précurseur de l’esprit de « Poésie-scientifique » au sens où nous l’entendons, — c’est quand, en large et puissant leit-motiv soutenant toute son œuvre, il évoque l’éternelle activité de cette Nature, son énergie de création et de destruction incessantes, causes de son éternelle survivance. Lui, qui ne connaît sans doute ni Thalès ni Héraclite, il retrouve le concept de la Mutabilité des choses et des êtres, leur « écoulement éternel », la suite ininterrompue du phénomène. Les individus meurent, mais les Espèces demeurent, qui sont la vraie réalité, et par elles le monde se survit