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et engendre contre la Mort. Donc, l’Amour est l’énergie naturelle qui perpétue l’Univers : l’homme doit tendre à être en harmonie avec la Nature, dont les lois sont la Loi.

Jean de Meung cependant, ne peut s’évader de l’époque. Et la question est là : sait-il ou non qu’il contredit étrangement à sa philosophie lorsqu’ensuite, il se hâte de placer les lois de nature sous la seule loi de Dieu, en acceptation théologique ? Quoi qu’il en soit, il s’en remet à l’Évangile — qui, dit-il, de même que la Nature, prononce le « croître et multiplier », et en morale prescrit suavement l’amour du prochain. Et il tente un passage logique, de protester que la Morale, qu’il conçoit en montée vers une harmonie progressivement destructive du désordre humain, prend en somme son principe dans la nature et dans la science…

Si nous délaissons cette partie d’accommodement contradictoire, peut-être imposée, nous dirons de Jean de Meung, qu’il nous est un prescient et premier poète de « l’idée » poétique-scientifique. Il ne lui manqua, pour imposer une décisive valeur de grand poète, que le sens artistique qui, au lieu de