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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

Leurs droits spécieux.

On s’efforça de justifier par des argumens une puissance soutenue par les armes ; et l’on prétendait que, suivant les premiers principes de la constitution, le consentement des gardes était essentiellement nécessaire à la nomination d’un empereur. L’élection des consuls, des magistrats et des généraux, quoique usurpée par le sénat, avait autrefois appartenu incontestablement au peuple romain[1]. Mais qu’était devenu ce peuple si célèbre ? on ne pouvait certainement pas le retrouver dans cette foule d’esclaves et d’étrangers qui remplissaient les rues de Rome ; multitude avilie et aussi méprisable par sa misère que par la bassesse de ses sentimens. Les défenseurs de l’état, composés de jeunes guerriers[2] nés au sein de l’Italie, et élevés dans l’exercice des armes et de la vertu, étaient les véritables représentans du peuple, et les seuls qui eussent le droit d’élire le chef militaire de la république. Ces raisonnemens n’étaient que spécieux ; il fut impossible d’y

    nous former une idée de ces exorbitantes libéralités par les plaintes d’Adrien sur ce que, lorsqu’il fit un César, la promotion lui avait coûté ter millies, H. S., deux millions et demi sterl.

  1. Cicéron, De legibus, III, 3. Le premier livre de Tite-Live, et le second de Denys d’Halycarnasse, montrent l’autorité du peuple, même dans l’élection des rois.
  2. Les levées se faisaient originairement dans le Latium, l’Étrurie et les anciennes colonies (Tac., Ann. IV, V). L’empereur Othon flatte la vanité des gardes en leur donnant les titres d’italiæ alumni, romana verè juventus. (Tac., Hist. I, 84.)