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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

reurs romains, témoins de l’esprit séditieux de ces régions, craignirent qu’elles ne profitassent de ces momens où toute autorité est suspendue. Pour leur épargner la tentation de faire un choix irrégulier, celui qui était désigné pour succéder à l’empire, était revêtu par l’empereur lui-même d’un pouvoir si considérable, qu’à la mort du prince, déjà puissant, il montait paisiblement sur le trône ; à peine même l’empire s’apercevait-il qu’il changeait de maître. [Tibère]Ainsi l’empereur Auguste tourna ses regards vers Tibère, lorsque des pertes réitérées eurent fait évanouir des espérances plus douces. Il obtint pour ce fils adoptif la censure et le tribunat ; et il l’associa, par une loi formelle, au commandement des armées et au gouvernement des provinces[1]. [Titus]Ainsi Vespasien sut enchaîner l’âme généreuse de l’aîné de ses fils. Titus était l’idole des légions de l’Orient qui venaient d’achever sous ses ordres la conquête de la Judée. Sa puissance devenait redoutable ; et comme les passions de la jeunesse jetaient un voile sur ses vertus, on se défiait de ses projets. Loin de se livrer à d’indignes soupçons, le prudent monarque associa son fils à toute la puissance et à la dignité impériale. Titus, pénétré de reconnaissance, se conduisit toujours comme le ministre respectueux et fidèle d’un père si indulgent[2].

  1. Velleius-Paterculus, l. II, c. 121 ; Suétone, Vie de Tibère, c. 20.
  2. Suétone, Vie de Titus, c. 6 ; Pline, préface de l’Hist. nat.