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DE L’EMPIRE ROMAIN. CHAP. IV.

d’une simplicité de mœurs si admirable[1]. Le sénat complaisant la déclara déesse à sa sollicitation ; elle était représentée dans ses temples avec les attributs de Junon, de Vénus et de Cérès. Les jeunes gens de l’un et de l’autre sexe avaient ordre de s’y rendre le jour de leur mariage, et d’offrir leurs vœux aux autels de cette chaste divinité[2].

Pour son fils Commode.

Les vices monstrueux du fils ont affaibli, aux yeux de la postérité, l’éclat des vertus du père : on a reproché à Marc-Aurèle d’avoir sacrifié le bonheur de plusieurs millions d’hommes à une tendresse excessive pour un enfant indigne, et d’avoir choisi un successeur dans sa famille plutôt que dans la république. Cependant la sollicitude de ce tendre père, et les hommes célèbres par leur mérite et par leurs vertus, qu’il appela à partager ses soins, ne négligèrent rien pour étendre l’esprit étroit du jeune Commode, étouffer ses vices naissans, et le rendre digne du trône qu’il devait un jour occuper. En général, le pouvoir de l’éducation est peu de chose, excepté dans ces cas heureux où il est presque inu-

  1. Méditations, l. I. Le monde a raillé la crédulité de Marc-Aurèle ; mais madame Dacier nous assure, et nous devons en croire une femme, que les maris seront toujours trompés quand leurs femmes voudront prendre la peine de dissimuler.
  2. Dion, l. LXXI, p. 1195 ; Hist. Aug., p. 33 ; Commentaire de Spanheim sur les Césars, p. 289. La déification de Faustine est le seul sujet de blâme que le satirique Julien ait pu découvrir dans le caractère accompli de Marc-Aurèle.