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HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

pirant, les bains et les spectacles, pour prendre des armes dont le poids les accablait, et qu’ils avaient perdu l’habitude de manier. On se flattait que l’aspect terrible des éléphans jetterait la terreur dans les armées du Nord ; mais ces animaux indociles ne reconnaissaient plus la main de leurs conducteurs. La populace insultait aux évolutions ridicules des soldats de marine tirés de la flotte de Misène, tandis que les sénateurs jouissaient secrètement de l’embarras et de la faiblesse de l’usurpateur[1].

Sa conduite incertaine.

Toutes les démarches de Julianus décelaient ses alarmes et sa perplexité, tantôt il exigeait du sénat que Sévère fût déclaré l’ennemi de l’état, tantôt il désirait qu’on l’associât à l’empire. Il envoyait publiquement à son rival des sénateurs consulaires, pour négocier avec lui comme ambassadeurs, tandis qu’il chargeait en particulier des assassins de lui arracher la vie. Il ordonna aux vestales et aux prêtres de sortir en pompe solennelle, revêtus de leurs habits sacerdotaux, portant devant eux les gages sacrés de la religion, et de s’avancer ainsi à la rencontre des légions Pannoniennes. Il s’efforçait en même temps d’interroger ou d’apaiser les destins par des cérémonies magiques, et par d’indignes sacrifices[2].

  1. Dion, l. LXXIII, p. 1233 ; Hérodien, l. II, p. 81. Une des plus fortes preuves de l’habileté des Romains dans l’art de la guerre, c’est d’avoir d’abord surmonté la vaine terreur qu’inspirent les éléphans, et d’avoir ensuite dédaigné le dangereux secours de ces animaux.
  2. Histoire Auguste, p. 62, 63.