Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 1.djvu/392

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Quels que fussent les motifs du testateur, le fisc réclamait sans distinction la vingtième partie des biens légués ; et dans le cours de deux ou de trois générations, toutes les propriétés des sujets devaient passer insensiblement dans les coffres du prince.

Règlemens des empereurs.

Néron, dans les premières années de son règne, porté par le désir de se rendre populaire, ou peut-être entraîné par un mouvement aveugle de bienfaisance, voulut abolir les douanes et l’impôt sur les consommations. Les plus sages sénateurs applaudirent à sa générosité ; mais ils le détournèrent de l’exécution d’un projet qui aurait détruit la force et les ressources de la république[1]. S’il eût été possible de réaliser cette chimère, des princes tels que Trajan et les Antonins auraient sûrement embrassé avec la plus vive ardeur l’occasion glorieuse de rendre un service si important au genre humain. Ils se contentèrent d’alléger le fardeau public, sans entreprendre de l’écarter tout-à-fait. La douceur et la précision de leurs lois déterminèrent la règle et la mesure de l’impôt, et mirent tous les citoyens à l’abri des interprétations arbitraires, des réclamations injustes et des vexations insolentes des fermiers publics[2] ; et il est singulier que, dans tous les siècles, les plus sages et les meilleurs princes aient toujours conservé la méthode dangereuse de réunir dans les mains

  1. Tacite, Annal., XIII, 50 ; Esprit des Lois, l. XII, c. 19.
  2. Voyez le Panégyrique de Pline, l’Histoire Auguste, et Burmann, De vectigal. passim.