Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/127

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Sa santé s’affaiblit de jour en jour pendant quatre ans ; ses infirmités s’accrurent, et il mourut enfin d’une fièvre de quatorze jours, qui le priva par intervalles de la raison. Lorsqu’il se vit à la fin de sa carrière, il édifia ses frères par son humilité. « S’il y a quelqu’un, leur dit-il du haut de la chaire, que j’aie frappé injustement, je me soumets au fouet des représailles. Si j’ai souillé la réputation d’un musulman, qu’il proclame mes fautes devant la congrégation. Si j’ai dépouillé un fidèle de ses biens, le peu que je possède acquittera le capital et l’intérêt de la dette. Oui, s’écria une voix sortant de la foule, j’ai droit de réclamer trois drachmes d’argent. » Mahomet trouva la plainte juste : il donna ce qu’on lui demandait, et remercia son créancier de l’avoir accusé dans ce monde plutôt qu’au dernier jour. Il vit avec une fermeté tranquille approcher son dernier moment ; il affranchit ses esclaves (dix-sept hommes, dit-on, et onze femmes) ; il régla très en détail l’ordre de ses funérailles, et modéra les lamentations de ses amis qu’il bénit avec des paroles de paix. Jusque trois jours avant sa mort, il fit en personne la prière publique ; le choix qu’il fit ensuite d’Abubeker pour le remplacer dans cette fonction, parut désigner cet ancien et fidèle ami pour son successeur dans les fonctions sacerdotales et royales ; mais il ne voulut pas s’exposer au danger des haines qu’aurait pu ex-

    poison, dont l’effet était d’autant plus ignominieux, que la femme qui le lui avait donné, avait eu l’intention de démontrer par là l’imposture du prophète.