Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/370

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tutèle d’un roi déjà dans la maturité de son âge, et cette faible régence avait été renversée par les plus ambitieux des bâtards de Pépin. Un gouvernement moitié sauvage et moitié corrompu se trouvait presque dissous ; les ducs tributaires, les comtes gouverneurs des provinces et les seigneurs des fiefs, cherchaient, à l’exemple des maires du palais, à s’élever sur la faiblesse d’un monarque méprisé. Parmi les chefs indépendans, un des plus hardis et des plus heureux fut Eudes, duc d’Aquitaine, qui, dans les provinces méridionales de la Gaule, usurpa l’autorité et même le titre de roi. Les Goths, les Gascons et les Francs se rassemblèrent sous le drapeau de ce héros chrétien ; il repoussa la première invasion des Sarrasins, et Zama, lieutenant du calife, perdit sous les murs de Toulouse son armée et la vie. L’ambition de ses successeurs fut aiguillonnée par la vengeance ; ils passèrent de nouveau les Pyrénées, et entrèrent dans la Gaule avec de grandes forces et la résolution de conquérir ce pays. Ils choisirent une seconde fois cette position avantageuse de Narbonne[1], qui avait déterminé les Romains à y établir leur première colonie ; ils réclamèrent la province de Septimanie ou du Languedoc, comme

  1. Avant même l’établissement de cette colonie, A. U. C. 630 (Velleius Patercul., I, 15), au temps de Polybe (Hist., l. III, p. 265, édit. de Gronov.), Narbonne était une ville celtique du premier rang, et l’un des lieux les plus septentrionaux du monde alors connu (d’Anville, Notice de l’ancienne Gaule, p. 473).