Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/524

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Perte de la langue latine.

Le fameux édit de Caracalla accorda à ses sujets, depuis la Bretagne jusqu’à l’Égypte, le nom et les priviléges de Romains ; et dès lors leur souverain, toujours au milieu de ses compatriotes, put à son choix fixer ou établir momentanément sa résidence dans l’une ou l’autre des provinces de la patrie commune. Lors de la division de l’Orient et de l’Occident, on conserva scrupuleusement l’unité idéale de l’empire ; dans leurs titres, leurs lois et leurs statuts, les successeurs d’Arcadius et d’Honorius s’annoncèrent toujours comme collègues inséparables dans les mêmes fonctions, comme associés à la souveraineté de l’empire et de la cité de Rome, renfermés dans les mêmes limites. Après la chute de la monarchie d’Occident, la dignité de la pourpre romaine se concentra tout entière sur les princes de Constantinople ; Justinien fut le premier qui réunit à l’empire les domaines de l’ancienne Rome, qui en étaient séparés depuis soixante années, et qui soutint par le droit de conquête l’auguste titre d’empereur des Romains[1]. Un motif de vanité ou de mécontentement détermina un de ses successeurs, Constantin II, à abandonner le Bosphore de Thrace et à rendre au Tibre ses anciens honneurs ; projet

  1. Justinien, dit l’historien Agathias (l. V, p. 157), πρωτος Ρωμαιων αυτοκρατωρ ονοματι και πραγματι. Au reste, les empereurs de Byzance ne prirent le titre formel d’empereur des Romains qu’après l’époque où les empereurs français et allemands de l’ancienne Rome voulurent le réclamer.