Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/405

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

confiance ; six générations successives se précipitant tête baissée dans le gouffre ouvert devant elles ; et des hommes de toutes les conditions, risquant leur fortune et leur existence, contre le fol espoir d’acquérir ou de conserver une tombe de pierre placée à deux mille milles de leur pays. Durant une période de deux cents ans, après le concile de Clermont, chaque printemps et chaque été produisirent une nouvelle émigration de pèlerins armés pour la défense de la Terre-Sainte ; mais les sept grands armemens ou croisades, eurent pour motif une calamité récente ou un danger pressant. Les nations furent entraînées par l’autorité de leur pontife et l’exemple de leurs souverains. À la voix des saints orateurs, le zèle s’enflammait, la raison devenait muette. La première place parmi les orateurs doit être assignée au moine Bernard, autrement saint Bernard[1]. [Caractère et mission de Saint Bernard. A. D. 1091-1153.]Né d’une famille noble de Bourgogne, environ huit ans avant la première conquête de Jérusalem ; il s’ensevelit à l’âge de vingt-trois ans dans le monastère de Cîtaux, alors dans la première ferveur de son insti-

  1. Les éclaircissemens les plus authentiques sur saint Bernard se trouvent dans ses propres écrits, publiés dans l’édition correcte du père Mabillon, et réimprimés à Venise en 1760, en six volumes in-folio. Tout ce que l’attachement personnel a pu recueillir, tout ce que la superstition a pu ajouter, se trouve dans deux Vies de ce saint, composées par ses disciples, dans le sixième volume : tout ce que l’érudition et la saine critique peuvent adopter, se trouve dans les préfaces des éditeurs bénédictins.