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continent avaient cherché une obscure retraite dans la chaîne des petites îles qui bordent l’extrémité du golfe adriatique. Environnés de la mer, libres, indigens, laborieux et inaccessibles, ils se réunirent insensiblement en république : les premiers fondemens de Venise furent jetés dans l’île de Rialto, et l’élection annuelle de douze tribuns fut remplacée par l’office à vie d’un duc ou doge perpétuel. Placés entre les deux empires, les Vénitiens s’enorgueillissent de l’opinion qu’ils ont toujours conservé leur indépendance primitive[1] ; ils ont soutenu par les armes leur liberté contre les latins, et pourraient facilement établir leurs droits par des écrits. Charlemagne lui-même abandonna toute prétention de souveraineté sur les îles du golfe Adriatique ; son fils Pépin échoua dans l’attaque des lagunes ou canaux, trop profonds pour sa cavalerie et trop peu pour l’approche de ses vaisseaux ; et sous le règne de tous les empereurs d’Allemagne, les terres de la république ont été clairement distinguées du royaume d’Italie. Mais les habitans de Venise adoptaient eux-mêmes l’opinion générale des nations étrangères et des Grecs leurs souverains, qui les considéraient comme une portion inaliénable de l’empire d’O-

  1. Pagi (Critica, t. III, A. D. 810, no 4, etc.) discute la fondation, l’indépendance de Venise et l’invasion de Pépin, (Voyez la Dissert. de Beretti, Chor. Ital. medii ævi ; in Muratori, Script., t. X, p. 153). Les deux critiques montrent un peu de partialité, le Français contre, et l’Italien pour la République.