Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/398

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conclut un traité avec Mahomet, dont les progrès étaient arrêtés par l’insurmontable barrière de Gallipoli. Le sultan et ses troupes traversèrent le Bosphore dans les vaisseaux grecs ; Mahomet fut amicalement reçu dans la capitale, et son heureuse sortie contre son rival, fut le premier pas vers la conquête de la Romanie. Après la mort de Mousa, la ruine de Constantinople fut encore suspendue par la prudence et la modération du vainqueur. Fidèle à ses engagemens et à ceux de Soliman, il respecta la paix et les lois de la reconnaissance. À sa mort, il confia la tutelle de ses deux fils à l’empereur grec, dans la vaine espérance de leur assurer un protecteur contre la cruauté de leur frère Amurath ; mais l’exécution de son testament aurait offensé l’honneur et la religion des Mahométans. Le divan prononça d’une voix unanime qu’on ne pouvait point abandonner le soin et l’éducation des jeunes princes à un chien de chrétien. Manuel, en apprenant ce refus, assembla ses conseils ; les avis furent partagés, mais la prudence du vieux Manuel céda à la présomption de son fils Jean, et employant à sa vengeance une arme dangereuse, il rendit la liberté au vrai ou faux Mustapha, qu’il retenait depuis long-temps en otage ou en captivité, et pour lequel la Porte ottomane lui payait une pension de trois cents mille aspres[1]. Pour

  1. L’aspre des Turcs (du mot grec ασϖρος) est ou était une pièce blanche ou d’argent, dont le prix est fort baissé aujourd’hui, mais qui valait alors au moins la cinquante--