Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/407

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ser une balle de pierre ou de fer avec une violence et une rapidité irrésistible. L’époque précise de l’invention et de l’application de la poudre à canon[1] se perd dans des traditions douteuses et des expressions équivoques ; mais il paraît suffisamment attesté qu’on la connut vers le milieu du quatorzième siècle, et qu’avant la fin de ce même siècle, l’artillerie était d’un usage familier dans les batailles et les siéges, par terre et par mer, chez les peuples de l’Allemagne, de l’Italie, de l’Espagne, de la France et de l’Angleterre[2]. Il est assez indifférent de savoir laquelle de ces nations s’en servit la première. Toutes possédèrent bientôt le même avantage ; et le perfectionnement général laissa la balance du pouvoir et

  1. Le premier et le second volume des Essais chimiques du docteur Watson contiennent deux discours précieux sur la découverte et la composition de la poudre à canon.
  2. On ne peut se fier sur cet objet aux autorités modernes. Ducange a recueilli les passages originaux (Gloss. lat., t. I, p. 675, Bombarda). Mais dans le jour douteux qui nous parvient de ces premiers écrivains, ce qu’on voit du nom, du bruit, du feu et de l’effet par lesquels ils semblent indiquer notre artillerie, peut très-bien s’adapter aux machines des anciens et au feu grégeois. Quant au canon dont les Anglais firent, dit-on, usage à la bataille de Créci, on doit balancer l’autorité de Jean Villani (Chron., l. XII, c. 65) par le silence de Froissard. Cependant Muratori (Antiq. Italiæ medii ævi, t. II, Dissert. 26, p. 514, 515) a produit un passage décisif de Pétrarque (De remediis utriusque Fortunæ dialog.), qui avant l’année 1344 a maudit ce tonnerre artificiel, nuper rara, nunc communis.