Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/81

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victoire servit d’occasion et d’excuse à une multitude de péchés ; mais la capitale de l’Orient contenait sans doute un nombre de beautés vénales ou complaisantes, suffisant pour satisfaire les désirs de vingt mille pèlerins, et le droit ou l’abus de l’esclavage ne s’étendait plus sur les femmes. Le marquis de Montferrat était le modèle de la discipline et de la décence, et l’on regardait le comte de Flandre comme le miroir de la chasteté. Ils défendirent, sous peine de mort, le viol des femmes mariées, des vierges et des religieuses ; quelques-uns des vaincus invoquèrent cette proclamation[1], et les vainqueurs la respectèrent quelquefois. La débauche et la cruauté furent contenues par l’autorité des chefs et les sentimens naturels des soldats. Ce n’étaient plus des sauvages du Nord ; et quelques féroces que pussent encore paraître les Européens à cette époque, le temps, la politique et la religion avaient adouci les mœurs des Français, et surtout des Italiens : mais leur avarice eut la liberté de se satisfaire par le pillage de Constantinople, sans égard pour la semaine sainte. Toutes les richesses publiques et celles des

    tiones, adulteria, et incestus in oculis omnium exercentes, non solum maritatas et viduas, sed et matronas et virgines deoque dicatas exposuerunt spurcitiis garcionum. Villehardouin ne parle point de ces accidens communs à la guerre.

  1. Nicétas sauva et épousa dans la suite une vierge noble qu’un soldat, εϖι μαρτυσι οπολλοις ονηδον εϖιζρωμωμενος, avait presque violée, sans égard pour εντολαι, ενταλματα ευ γεγονοτων.