Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/83

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crainte, et l’opinion générale évalue le pillage secret fort au-dessus de celui qui fut publiquement distribué. Ce dernier surpassait cependant tout ce qu’on avait jamais vu et tout ce qu’on pouvait espérer[1]. Après un partage égal entre les Français et les Vénitiens, les premiers prélevèrent une somme de cinquante mille marcs pour satisfaire à la dette contractée avec la république, et il leur restait encore quatre cent mille marcs d’argent[2], environ huit cent mille livres sterling : je ne puis pas mieux indiquer la valeur relative d’une pareille somme dans ce siècle, qu’en la représentant comme égale à sept années du revenu du royaume d’Angleterre[3].

  1. En parlant de la masse générale des richesses, Gunther observe, ut de pauperibus et advenis civis ditissimi redderentur (Hist. C. P., c. 18). Villehardouin (no 132), que depuis la création ne fut tant gaaignié dans une ville. Baudouin (Gesta, c. 92) ut tantum tota non videatur possidere Latinitas.
  2. Villehardouin, nos 133-135. Il y a une variante dans le texte, et l’on peut lire cinq cent mille au lieu de quatre cent mille. Les Vénitiens avaient offert de prendre la masse entière des dépouilles, et de donner quatre cents marcs à chaque chevalier, deux cents à chaque prêtre ou cavalier, et cent à chaque soldat. Ce marché n’aurait pas été avantageux pour la république. (Le Beau, Hist. du Bas-Empire, t. XX, p. 506 ; je ne sais d’où il a pris cela.)
  3. Au concile de Lyon (A. D. 1245), les ambassadeurs d’Angleterre évaluèrent le revenu de la couronne comme inférieur à celui du clergé étranger, qui montait à soixante mille marcs chaque année (Matthieu Paris, p. 451 ; Hist. d’Angleterre, par Hume, vol. II, p. 170).