Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/125

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

quelques jours il se déclara l’ami et le père des vaincus ; mais bientôt la scène changea, et avant son départ l’Hippodrome fut inondé du sang des plus nobles captifs. Les chrétiens parlent avec horreur de sa perfide cruauté : dans leur récit, l’exécution du grand duc et de ses deux fils est embellie de toutes les couleurs d’un martyre héroïque ; ils attribuent sa mort au refus généreux qu’il fit de livrer ses enfans aux infâmes désirs de Mahomet. Mais un historien grec a laissé échapper, par inadvertance, un mot sur une conspiration, sur un projet de rétablir l’empire de Byzance, sur des secours qu’on attendait de l’Italie : de pareilles trahisons peuvent être glorieuses ; mais le rebelle assez courageux pour les hasarder, n’a pas le droit de se plaindre s’il les paye de sa vie ; et l’on ne peut blâmer un vainqueur de détruire des ennemis auxquels il ne peut plus se fier. Le sultan retourna à Andrinople le 18 juin, et il sourit des basses et trompeuses félicitations des princes chrétiens qui voyaient leur perte prochaine dans la chute de l’empire d’Orient.

Il repeuple et embellit Constantinople.

Constantinople avait été laissée vide et désolée, sans prince et sans peuple ; mais on n’avait pu lui ôter cette admirable position qui la désignera toujours pour la métropole d’un grand empire, et le génie du lieu triomphera toujours des révolutions du temps et de la fortune. Bursa et Andrinople, autrefois siéges de l’empire ottoman, ne furent plus que des villes de province, et Mahomet II établit sa résidence et celle de ses successeurs sur la colline éle-