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rite patient, les oppositions publiques ou secrètes de la jalousie et du préjuge. À l’âge de trente-six ans, on le sollicita d’accepter ce qui faisait l’objet de ses désirs : il était alors dans la solitude de Vaucluse ; et le jour où il reçut cette invitation solennelle de la part du sénat de Rome, il en reçut une semblable de l’université de Paris. Sans doute il n’appartenait pas au savoir d’une école de théologie et à l’ignorance d’une ville livrée au désordre, d’accorder cette couronne immortelle quoique idéale, que décernent au génie les hommages du public et de la postérité ; mais Pétrarque eut soin d’écarter cette fâcheuse réflexion, et après quelques momens d’incertitude et de joie, il se décida pour les honneurs que lui offrait la métropole du monde.

Son couronnement poétique à Rome. A. D. 1341, Avril 8.

La cérémonie de son couronnement[1] fut célébrée au Capitole, par le suprême magistrat de la république, son protecteur et son ami. On y vit douze jeunes patriciens en habit écarlate, et six représentans des plus illustres familles, en robes vertes, avec des guirlandes de fleurs. Le sénateur, comte d’Anguillara, allié des Colonne, monta sur son trône, environné des princes et des nobles ; et Pétrarque, appelé par un héraut, se leva. Après avoir fait un

  1. L’abbé de Sade décrit avec beaucoup d’exactitude tout ce qui a rapport au couronnement de Pétrarque (t. I, p. 425-435 ; t. II, p. 1-6, notes, p. 1-13). Ces détails sont tirés des écrits de Pétrarque et du journal romain de Louis Monaldeschi : il a eu soin de ne pas mêler à ce récit les fables plus récentes de Sannuccio Delbene.