Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 2.djvu/312

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tages qu’il pouvait tirer de sa naissance et de sa situation. Les plus fidèles serviteurs du père méprisaient l’incapacité du fils, et redoutaient sa cruelle arrogance. Son rival avait pour lui le cœur des peuples ; le sénat même préférait un usurpateur à un tyran. Les artifices de Dioclétien entretinrent le mécontentement général. L’hiver fut employé en intrigues secrètes et en préparatifs ouverts pour une guerre civile. [A. D. 285. Mai.]Au printemps, les armées de l’Orient et de l’Occident se rencontrèrent dans les plaines de Margus, petite ville de Mœsie, non loin des rives du Danube[1]. Les troupes qui venaient de faire trembler le grand roi, se trouvaient épuisées par les maladies et par les fatigues de leur dernière expédition ; elles ne pouvaient disputer la victoire aux légions d’Europe, dont la force n’avait éprouvé aucune altération. Les lignes de Dioclétien furent rompues, et ce prince désespéra pendant quelque temps de la pourpre et de la vie. Mais Carin perdit, par l’infidélité de ses officiers, l’avantage que lui avait procuré la valeur de ses soldats. Un tribun dont il avait séduit la femme saisit l’occasion de se venger, et d’un seul coup il éteignit les discordes civiles dans le sang de l’adultère[2].

  1. Eutrope marque sa situation avec beaucoup d’exactitude. Cette ville était entre le Mons Aureus et Viminiacum, M. d’Anville (Géogr. anc., t. I, p. 304) place Margus à Kastolatz en Servie, un peu au-dessous de Belgrade et de Semendrie.
  2. Hist. Aug., p. 254 ; Eutrope, IX, 20 ; Aurel.-Victor ; Victor, in Epit.