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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 2.djvu/82

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célèbre écrivain de nos jours aperçoit dans les dons honorables accordés par le chef à ses braves compagnons, l’origine des fiefs que les seigneurs barbares, après la conquête des provinces romaines, distribuèrent à leurs vassaux, en exigeant pareillement d’eux l’hommage et le service militaire[1]. Ces conditions cependant sont entièrement contraires aux maximes des Germains, qui aimaient à faire des présens, mais qui auraient rougi d’imposer ou d’accepter aucune obligation.[2]

Chasteté des Germains.

« Dans les siècles de chevalerie, au moins si l’on en croit les vieux romanciers, tous les hommes étaient braves, toutes les femmes étaient chastes. » La dernière de ces vertus, quoique bien plus difficile à acquérir et à conserver que la première, est attribuée presque sans exception aux femmes des Germains. La polygamie avait lieu seulement parmi les princes ; encore ne se la permettaient-ils que pour multiplier leurs alliances. Les divorces étaient défendus par les mœurs, plutôt que par les lois. On punissait l’adultère comme un crime rare et impardonnable. Ni l’exemple, ni la coutume, ne pouvaient justifier la séduction[3]. Il nous est permis de croire que Ta-

  1. Esprit des Lois, l. XXX, c. 3. Au reste, l’imagination brillante de Montesquieu est corrigée par la logique exacte de M. l’abbé de Mably, Observ. sur l’Hist. de France, t. I, page 356.
  2. Gaudent muneribus, sed nec data imputant, nec acceptis obligantur. (Tacite, Germ., 21).
  3. La femme coupable d’adultère était fouettée dans tout