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Première cause. Zèle des Juifs.

I. Nous avons déjà fait connaître l’harmonie religieuse du monde ancien, et la facilité avec laquelle tant de nations si différentes, et même ennemies, avaient adopté, ou du moins respecté les superstitions les unes des autres[1]. Un seul

  1. Cette facilité n’a pas toujours empêché l’intolérance qui semble inhérente à l’esprit religieux lorsqu’il a l’autorité en main. La séparation de la puissance ecclésiastique et de la puissance civile paraît être le seul moyen de maintenir à la fois et la religion et la tolérance ; mais cette idée est très-moderne. Les passions, qui se mêlent aux opinions, rendirent souvent les païens intolérans ou persécuteurs ; témoin les Perses, les Égyptiens, les Grecs et les Romains même.
    1oLes Perses. Cambyse, vainqueur des Égyptiens, condamna à mort les magistrats de Memphis, parce qu’ils avaient rendu des honneurs à leur dieu Apis : il se fit amener le dieu, le frappa de son poignard, fit battre les prêtres de verges, et ordonna qu’on fît main-basse sur tous les Égyptiens que l’on trouverait célébrant la fête d’Apis : il fit brûler les statues de tous les dieux. Non content de cette intolérance, il envoya une armée pour réduire en esclavage les Ammoniens et mettre le feu au temple où Jupiter rendait ses oracles. (Voyez Hérodote, l. III, c. 25, 27, 28, 29, 37 — Trad. de M. Larcher, tom. 3, p. 22, 24, 25, 33). — Xerxès, lors de son invasion dans la Grèce, agit d’après les mêmes principes : il démolit tous les temples de la Grèce et de l’Ionie, à l’exception de celui d’Éphèse. (Voyez Pausanias, l. VII, p. 533 et l. X, p. 887. — Strabon, l. XIV, p. 941.)
    2oLes Égyptiens. Ils se croyaient souillés lorsqu’ils avaient bu dans la même coupe, ou mangé à la même table qu’un homme d’une croyance différente de la leur. « Celui qui a tué volontairement quelque animal consacré, est puni de mort ; mais si quelqu’un a tué, même involontairement,