Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/168

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hautement une autorité supérieure à celle du magistrat. L’étendue et la durée de cette conspiration spirituelle semblait la rendre de jour en jour plus digne d’attirer les regards du prince. Nous avons déjà observé que le zèle actif et triomphant des chrétiens les avait insensiblement répandus dans toutes les provinces et dans presque toutes les villes de l’empire. Les nouveaux convertis paraissaient renoncer à leur patrie, à leur famille, afin de s’unir par des liens indissolubles à un corps particulier, qui prenait partout un caractère différent de celui du genre humain. Leur aspect sombre et austère, leur horreur pour les affaires et pour les plaisirs de la vie, leurs prédictions fréquentes des calamités qui menaçaient l’univers[1], causaient la plus vive inquiétude ; les païens craignaient qu’il ne s’élevât quelque danger du sein de cette secte, d’autant plus redoutée qu’elle était plus obscure, « Quelle que puisse être leur conduite, dit Pline en parlant des chrétiens, leur opiniâtreté inflexible paraît mériter d’être punie[2]. »

  1. Comme les prophéties concernant l’ante-christ, l’embrasement prochain, etc., irritaient ceux des païens qu’elles ne convertissaient pas, les fidèles n’en parlaient qu’avec précaution et avec réserve ; et les montanistes furent blâmés pour avoir divulgué trop librement ce dangereux secret. Voyez Mosheim, p. 413.
  2. Neque enim dubitabam (telles sont les expressions de Pline) quodcumque esset quod faterentur, pervicaciam certè et inflexibilem obstinationem debere puniri.