Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/170

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crime est consommé, les sectaires boivent le sang, et dans leurs transports furieux ils déchirent les membres palpitans. Tous également coupables du même forfait, ils s’engagent mutuellement à un secret éternel. À ce sacrifice inhumain, ajoutait-on avec la même assurance, succède un festin digne de cette horrible scène, et dans lequel l’intempérance excite la débauche la plus révoltante. Au moment désigné, les lumières sont tout à coup éteintes ; la honte est bannie, la nature est oubliée ; et, selon les effets du hasard, les ténèbres de la nuit sont souillées par le commerce incestueux des frères et des sœurs, des mères et de leurs fils »[1].

Leur défense imprudente.

Mais la lecture des anciennes apologies ne laissera pas même le plus léger soupçon dans l’esprit d’un adversaire de bonne foi. Les chrétiens, avec la sécurité intrépide de l’innocence, appelaient de ces bruits vagues et populaires à l’équité des magistrats. Ils avouent que si l’on peut prouver les crimes qui leur sont imputés par la calomnie, ils méritent les plus sévères punitions : ils provoquent le châtiment, ils défient la preuve : ils avancent en même temps, avec autant de raison que de vérité, que l’accusation n’est pas moins dépourvue de probabilité que dénuée

  1. Voyez saint Justin martyr, Apolog., I, 35 ; II, 14 ; Athenagoras, in Legation., c. 27 ; Tertullien, Apologet., c. 7, 8, 9 ; Minucius-Felix, c. 9, 10, 30, 31. Le dernier de ces écrivains rapporte l’accusation d’une manière très-élégante et très-circonstanciée. La réponse de Tertullien est la plus hardie et la plus vigoureuse.