Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/172

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’erreur, pensaient toujours en hommes, et se gouvernaient selon les préceptes du christianisme[1]. Les schismatiques faisaient retomber de pareilles accusations sur l’Église dont ils avaient abandonné la communion[2], et l’on reconnaissait de tous côtés que la licence la plus scandaleuse régnait parmi un grand nombre de ceux qui affectaient le nom de chrétiens. Un magistrat idolâtre, qui n’avait ni le loisir ni le talent nécessaires pour discerner la nuance presque imperceptible entre la foi orthodoxe et la dépravation hérétique, pouvait aisément imaginer qu’une animosité mutuelle leur avait arraché l’aveu d’un crime commun. Heureusement pour le repos, ou

  1. Voyez saint Justin martyr, Apolog., I, 35 ; saint Irenée, adv. heræs., I, 24 ; S. Clément d’Alexandrie, Stromat., l. III, p. 438 ; Eusèbe, IV, 8. Nous serions forcés d’entrer dans des détails ennuyeux et dégoûtans, si nous voulions rapporter tout ce que les écrivains des temps suivans ont imaginé, tout ce que saint Épiphane a adopté, tout ce que M. de Tillemont a copié. M. de Beausobre (Hist. du Manich., l. IX, c. 8, 9) a exposé avec beaucoup de force les moyens détournés et artificieux qu’ont employés saint Augustin et le pape Léon I.
  2. Lorsque Tertullien devint montaniste, il diffama la morale de l’Église, qu’il avait si courageusement défendue. Sed majoris est agape, quia per hanc adolescentes tui cum sororibus dormiunt, appendices scilicet gulæ lascivia et luxuria. De jejuniis, c. 17. Le trente-cinquième canon du concile d’Elvire prend des mesures contre les scandales qui souillaient trop souvent les veilles de l’Église, et qui déshonoraient le nom chrétien aux yeux des incrédules.