Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/20

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et cette défense, quelquefois perpétuelle, s’étendait presque toujours à la troisième, à la septième, ou même à la dixième génération. L’obligation de prêcher aux gentils la foi de Moïse n’avait jamais été prescrite comme un précepte de la loi ; et les Juifs ne pensèrent point à s’imposer volontairement un pareil devoir. Lorsqu’il s’agissait d’admettre de nouveaux citoyens, ce peuple insociable suivait plutôt l’orgueilleuse vanité des Grecs que la politique généreuse des Romains. Les descendans d’Abraham, fiers de l’opinion qu’ils avaient seuls hérité de l’alliance, craignaient de diminuer la valeur de leur patrimoine en le partageant trop facilement avec les étrangers de la terre. Une plus grande communication avec le genre humain étendit leurs connaissances sans guérir leurs préjugés ; et toutes les fois que le dieu d’Israël acquérait de nouveaux adorateurs, il en était bien plus redevable à l’humeur inconstante du polythéisme qu’au zèle actif de ses propres missionnaires[1]. La religion de Moïse semble avoir été instituée pour une contrée particulière, aussi-bien que pour une seule nation. Si les Juifs eussent exécuté rigoureusement le précepte qui ordonnait à tous les mâles de se présenter trois fois dans l’année devant Jehovah, il leur eût été impossible de se répandre au-delà de la terre promise[2]. À la vérité, la destruction du temple de

  1. Tout ce qui a rapport aux prosélytes juifs a été traité avec beaucoup d’habileté par Basnage, Hist. des Juifs, l. VI, c. 6, 7.
  2. Voyez Exode, XXIV, 23 ; Deuter., XVI, 16 ; les com-