Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/241

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Paul de Samosate. Ses mœurs. A. D. 260.

L’histoire de Paul de Samosate, qui remplissait le siége métropolitain d’Antioche à l’époque où l’Orient était entre les mains d’Odenat et de Zénobie, peut servir à faire connaître la condition et l’esprit des temps. Les richesses de ce prélat prouvent suffisamment combien il était coupable, puisqu’elles ne lui venaient point de l’héritage de ses ancêtres, et qu’il ne les avait point acquises par une honnête industrie. Mais Paul regardait le service de l’Église comme une profession très-lucrative[1]. Tout était vénal dans sa juridiction ecclésiastique. Il tirait de fréquentes contributions des fidèles les plus opulens, et il s’appropriait une partie considérable du revenu public. Son orgueil et son luxe avaient rendu la religion chrétienne odieuse aux gentils. La chambre du conseil et le trône de ce fier métropolitain, sa magnificence lorsqu’il paraissait en public, la foule de suppliants qui briguaient un de ses regards, la multitude de lettres et de placets auxquels il dictait ses réponses, et le tourbillon des affaires qui l’entraînait sans cesse, convenaient bien mieux à l’état

  1. Paul aimait mieux le titre de ducenarius que celui d’évêque. Le ducenarius était un intendant de l’empereur (ainsi appelé de ses appointemens, qui se montaient à deux cents sesterces, environ seize cents livres sterl. (Voyez Saumaise et l’Histoire Auguste, p. 124.) Quelques critiques supposent que l’évêque d’Antioche obtint effectivement cet emploi de Zénobie. D’autres regardent seulement cette dénomination comme une expression figurée, pour désigner le faste et l’insolence du prélat.