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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/27

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tenaient toujours intimement, par leurs mœurs, à des compatriotes impies, dont les malheurs, attribués par les païens au mépris de l’Être-Suprême, étaient, à bien plus juste titre, aux yeux des chrétiens, l’effet de la colère d’un Dieu vengeur. Après la destruction de Jérusalem, les nazaréens se retirèrent au-delà du Jourdain, dans la petite ville de Pella, où cette ancienne Église languit durant plus de soixante ans dans la solitude et dans l’obscurité[1]. Ils avaient toujours la consolation de faire de pieuses visites à la cité sainte ; et ils se nourrissaient de l’espoir qu’ils seraient un jour rendus à ces demeures chéries que la religion et la nature leur avaient appris à aimer et à respecter. Mais enfin, sous le règne d’Adrien, le fanatisme désespéré des Juifs combla la mesure de leurs calamités ; et les Romains, indignés des rebellions réitérées de ce peuple, usèrent avec rigueur des droits de la victoire. L’empereur bâtit une nouvelle ville sur le mont Sion[2], il lui donna le nom d’Œlia Capitolina, lui accorda les priviléges d’une

  1. Eusèbe, l. III, c. 6. Le Clerc, Hist. ecclésiast., p. 605. Durant cette absence momentanée, l’évêque et l’Église de Pella retinrent toujours le titre de Jérusalem. C’est ainsi que les pontifes romains résidèrent pendant soixante-dix ans à Avignon, et que les patriarches d’Alexandrie ont transféré depuis long-temps leur siége épiscopal au Caire.
  2. Dion Cassius, l. LXXIX. Ariston de Pella (apud Euseb., l. IV, c. 6) atteste que l’on interdit aux Juifs l’entrée de Jérusalem : il en est parlé dans plusieurs écrivains ecclésiastiques. Quelques-uns d’entre eux cependant se sont trop empressés d’étendre cette défense à tout le pays de la Palestine.