Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/475

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

leurs savantes manœuvres. Ils engagèrent sagement l’action par la gauche ; et avançant leur aile entière de cavalerie sur une ligne oblique, ils la tournèrent précipitamment sur le flanc droit de l’ennemi, qui n’était point préparé à soutenir l’impétuosité de leur attaque. Mais les Romains de l’Occident se rallièrent bientôt par l’habitude de la discipline, et les Barbares de la Germanie soutinrent la réputation de leur intrépidité nationale. L’affaire devint générale, se soutint avec des succès variés et de singuliers retours de fortune, et finit à peine avec le jour. On accorde à la cavalerie l’honneur de la victoire éclatante que remporta Constance. Ses cuirassiers sont représentés comme autant de colonnes d’acier massif ; leurs armures brillantes éblouissaient les légions gauloises, dont ils rompaient l’ordre serré avec leurs lances d’une énorme pesanteur. Dès que les légions furent en désordre, la cavalerie légère pénétra dans les rangs l’épée à la main, et acheva la déroute. Cependant les grands corps des Germains se trouvaient exposés presque nus à la dextérité des archers orientaux, et des troupes entières de ces Barbares se jetaient, de douleur et de désespoir, dans le cours large et rapide de la Drave[1]. On fait monter le nombre des

  1. Julien, orat. 1, p. 36, 37 ; et orat. 2, p. 59, 60 ; Zonare, t. II, l. XIII, p. 17 ; Zosime, l. II, p. 130-133. Le dernier de ces écrivains vante la dextérité de l’archer Ménélas, qui lançait trois flèches en même temps ; avantage qui, selon ses idées sur l’art militaire, aurait beaucoup contribué à la victoire de Constance.