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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/68

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difficultés d’un dialecte barbare. L’inspiration divine, suivant la tradition, se communiquait soit par des visions, soit par des songes. Les fidèles de tout rang, de tout état, les femmes et les vieillards, les enfans aussi-bien que les évêques, avaient également part à cette faveur. Lorsque leurs âmes pieuses avaient été suffisamment préparées par les prières, les jeûnes et les veilles, à recevoir l’impulsion extraordinaire, ils entraient tout à coup dans un saint transport ; et, ravis en extase, ils disaient ce qui leur était inspiré, simples instrumens de l’Esprit-Saint, comme la flûte est l’organe de celui qui en tire des sons[1]. Nous pouvons ajouter que ces visions avaient principalement pour objet de dévoiler l’histoire future de l’Église, ou d’en régler l’administration présente. L’expulsion des démons que l’on contraignait d’abandonner le corps des malheureux qu’ils avaient eu la permission de tourmenter, était le triomphe ordinaire, mais en même temps le plus signalé de la foi ; et les anciens apologistes ne cessent de répéter qu’une pareille victoire est la preuve la plus convaincante de la vérité du christianisme. Cette cérémonie imposante avait lieu communément en public devant un grand nombre de spectateurs. Le patient était délivré par le pouvoir ou par l’habileté de l’exorciste ; et

  1. Athénagoras, in legatione ; saint Justin martyr, Cohort. ad gentes ; Tertullien, advers. Marcion, l. IV. Ces descriptions ne sont pas très-différentes de celles de la fureur prophétique, pour laquelle Cicéron (De divinatione, II, 54) montre si peu de respect.