Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/160

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déterminèrent trop promptement à regarder comme insuffisantes leurs troupes et leurs fortifications. Ils se laissèrent trop aisément persuader que les soldats chinois, qui, pour éviter d’être surpris par les Huns, annoncés de tous côtés par la lueur des flammes, dormaient le casque en tête et la cuirasse sur le dos, seraient bientôt épuisés par des travaux continuels et des marches inutiles[1] ; pour se procurer une tranquillité précaire et momentanée, ils stipulèrent un payement annuel d’argent et d’étoffes de soie ; et le misérable expédient de déguiser un tribut réel sous la dénomination d’un don et d’un subside, fut également adopté par les empereurs de Rome et par ceux de la Chine ; mais le tribut de ceux-ci comprenait un article encore plus honteux, qui révoltait les sentimens de la nature et de l’humanité. Les fatigues d’une vie sauvage, qui détruisent dans leurs premières années les enfans nés avec une constitution faible, mettent une disproportion sensible dans le nombre des deux sexes. Les Tartares sont généralement laids, et même difformes : ils se servent de leurs femmes pour tous les travaux domestiques ; mais ils sont avides

  1. Voyez un Mémoire fort long et fort libre présenté par un mandarin à l’empereur Vouti, en l’an 180 avant Jésus-Christ, dans du Halde (t. II, p. 412-426), d’après une collection de papiers d’état, écrite avec le crayon rouge par Kamhi lui-même (p. 384-612). Un second Mémoire du ministre de la guerre, Kang-Mou (tom. II, p. 555), fournit quelques détails curieux sur les mœurs des Huns.