Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/198

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essaims de Barbares avaient passé le Danube laissé sans défense, et s’avançaient, soit pour secourir Fritigern, soit pour l’imiter. Craignant avec raison d’être bloqué lui-même et peut-être écrasé par les armes d’une nation inconnue, Saturnin abandonna le siége du camp des Visigoths, et les Barbares furieux, délivrés de leurs entraves, rassasièrent leur faim et satisfirent leur vengeance par la dévastation du pays fertile qui s’étend à plus de trois cents milles depuis les bords du Danube jusqu’au détroit de l’Hellespont[1]. L’habile Fritigern avait appelé avec succès à son secours les passions et l’intérêt de ses alliés barbares, dont l’avidité pour le pillage et la haine contre les Romains avaient secondé ou même prévenu l’éloquence de ses ambassadeurs. Il s’unit par une étroite et utile alliance avec le corps principal de sa nation, qui obéissait à Saphrax et à Alathæus, comme gardiens du jeune roi. Les tribus rivales suspendirent, en faveur de l’intérêt commun, leur ancienne animosité ; toute la partie indépendante de la nation se rangea sous le même étendard, et il paraît même que les chefs des Ostrogoths cédèrent le commandement à la supériorité de mérite reconnu du général des Visigoths. Il obtint le secours des Taifales, dont la réputation militaire était souillée et déshonorée par l’infamie de leurs mœurs publiques. Chaque jeune homme de cette nation, à son entrée dans le monde, s’attachait à un des guerriers de la tribu par les liens

  1. Ammien, XXXI, 8.