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sujets avaient de bonne heure reçu la profonde empreinte. Plein de respect pour la personne, ou plutôt pour le nom de ses souverains, le peuple chargea également de sa haine les rebelles qui attaquaient l’autorité de son monarque et les ministres qui en abusaient.

Caractère de Rufin, et son administration. A. D. 386-395.

Théodose a terni la gloire de son règne par l’élévation de Rufin, odieux favori à qui, dans un siècle de factions civiles et religieuses, tous les partis ont imputé tous les crimes. Poussé par l’avarice et par l’ambition[1], Rufin, né dans un coin obscur de la Gaule[2], quitta son pays natal pour chercher fortune dans la capitale de l’Orient. Le talent naturel d’une élocution facile et hardie[3] lui obtint des succès au barreau, et ces succès le conduisirent naturellement aux premiers emplois de l’état. Il parvint graduellement, par des promotions régulières, à la charge de maître des offices, et dans l’exercice de

  1. Alecton, envieuse de la félicité publique, convoque un synode infernal ; Mégère lui recommande Rufin son pupille, qu’elle excite à exercer toute sa noirceur, etc. ; mais il y a autant de différence entre la verve de Claudien et celle de Virgile, qu’entre les caractères de Turnus et de Rufin.
  2. Tillemont, Hist. des emper., t. V, p. 770. Il est évident, quoique de Marca paraisse honteux de son compatriote, que Rufin est né à Éluse, capitale de la Novempopulanie, et à présent petit village de Gascogne. (D’Anville, Notice de l’ancienne Gaule, p. 289.)
  3. Philostorg., l. XI, c. 3 ; et les Dissertations de Godefroy, p. 440.