Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/419

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il donnait sa confiance par habitude ; et le génie sévère du général étranger n’inspira au monarque que de la crainte et de l’aversion. Jusqu’au moment où la jalousie de la puissance les divisa, l’épée de Gainas et l’influence d’Eudoxie soutinrent la faveur du grand chambellan ; mais le perfide Goth, devenu maître général de l’Orient, trahit sans hésiter son bienfaiteur, et employa les troupes qui avaient massacré récemment l’ennemi de Stilichon, à maintenir contre lui l’indépendance du trône de Constantinople. Les favoris d’Arcadius fomentèrent une guerre secrète et irréconciliable contre un héros qui aspirait à gouverner et à défendre les deux empires et les deux fils de Théodose. Ils employèrent sans relâche les plus odieux artifices pour lui enlever l’estime du prince, le respect du peuple et l’amitié des Barbares. Des assassins, séduits par l’appât de l’or, attentèrent plusieurs fois à la vie de Stilichon : un décret du sénat de Constantinople le déclara l’ennemi de l’état et confisqua ses vastes possessions dans les provinces de l’Orient. Dans un temps où l’union constante de tous les sujets de l’empire et des secours mutuels pouvaient seuls retarder la ruine du monde romain, Arcadius et Honorius apprirent à leurs sujets à regarder les deux états comme tout-à-fait étrangers l’un à l’autre, ou même comme ennemis ; à se réjouir mutuellement de leurs calamités réciproques, et à traiter comme des alliés fidèles les Barbares qu’ils excitaient à envahir le territoire de leurs compa-