Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 5.djvu/458

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vait encore l’ennemi, et les obstacles qui devaient retarder sa marche. Il comptait principalement sur la difficulté du passage des rivières d’Italie, l’Adige, le Mincio, l’Oglio et l’Adda, qui enflent prodigieusement en hiver par la fonte des neiges et par les pluies dans le printemps[1], et deviennent des torrens impétueux ; mais le hasard voulut que la saison fût très-sèche, et les Goths traversèrent sans obstacle des lits vastes et pierreux au milieu desquels se faisait remarquer à peine un faible filet d’eau. Un fort détachement de leur armée s’empara du pont et assura le passage de l’Adda ; et lorsque Alaric approcha des murs ou plutôt des faubourgs de Milan, il put jouir de l’orgueilleuse satisfaction de voir fuir devant lui l’empereur des Romains. Honorius, accompagné d’une faible suite de ses ministres et de ses eunuques, traversa rapidement les Alpes avec le dessein de se réfugier dans la ville d’Arles, dont ses prédécesseurs avaient souvent fait leur résidence ; mais il avait à peine passé le [2], qu’il fut atteint

  1. Tout voyageur doit se rappeler l’aspect de la Lombardie (Voyez Fontenelle, t. V, p. 279), qui est si souvent tourmentée par les crues abondantes et irrégulières des eaux. Les Autrichiens devant Gènes campèrent dans le lit de la Polcevera qui était à sec. « Nè sarebbe, dit Muratori, mai passato per mente a que’ buoni Allemanni, che quel picciolo torrente potesse, per cosi dire in un instante cangiarsi in un terribil gigante. » Annal. d’Ital., t. XVI, p. 443. Milan, 1753, édit. in-8o.
  2. Claudien n’éclaircit pas bien cette question, où était