Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/14

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plus difficiles, et l’enthousiasme qu’il inspirait aux Barbares effaça insensiblement l’antique et presque superstitieuse vénération qu’imprimait encore aux nations la majesté du nom romain. Ses troupes, animées par l’espoir du butin, suivirent la voie Flaminienne, occupèrent les passages abandonnés de l’Apennin[1], descendirent dans les plaines fertiles de l’Ombrie, et purent se rassasier à leur plaisir, sur les bords du Clitumne, de la chair des bœufs sacrés, dont la race blanche comme neige avait été si long-temps réservée à l’usage des sacrifices célébrés à l’occasion des triomphes[2]. La position escarpée de la ville de Narni, un orage et le tonnerre qui grondait avec violence, sauvèrent cette petite ville. Le roi des Goths, dédaignant de s’arrêter pour une si vile proie, continua de s’avancer avec la même

  1. Addison (voyez ses ouvrages, vol. II, p. 54, édit. Baskerville) a donné une description très-pittoresque de la route qui traverse l’Apennin. Les Goths ne s’amusèrent point à admirer les beautés de cette perspective ; mais ils virent avec satisfaction que le passage étroit pratiqué dans le rocher par Vespasien, et connu sous le nom de Saxa intercisa, était tout-à-fait abandonné. Clavier, Italia antiq., t. I, p. 618.
  2. Hinc albi Clitumni greges, et maxima taurus
    Victima ; sæpe tuo perfusi flumine sacro,
    Romanos ad templa Deum duxêre triumphos.

    Outre Virgile, la plupart des poètes latins, Properce, Lucain, Silius-Italicus, Claudien, etc., dont les passages sont rapportés dans Clavier et dans Addison, ont célébré les victimes triomphales du Clitumne.