Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/239

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magnificence et par leur uniformité. Un bocage ombrageait le centre de la ville. Le nouveau port, vaste et sûr, facilitait le commerce des citoyens, et attirait celui de l’étranger ; et dans le sein de l’Afrique, presque sous les yeux des Barbares, on voyait briller les jeux du Cirque et la pompe des théâtres. La réputation des Carthaginois n’était pas si avantageuse que celle de leur ville ; le reproche de la foi punique convenait encore à la finesse et à la duplicité de leur caractère[1]. L’esprit du commerce et l’habitude du luxe avaient corrompu leurs mœurs ; mais les abominations contre lesquelles surtout Salvien, prédicateur de ce siècle[2], s’élève avec véhémence, sont leur mépris coupable pour les moines, et la pratique criminelle du péché contre nature. Le roi

  1. L’auteur anonyme de l’Expositio totius Mundi, compare dans son latin barbare le pays avec les habitans ; et après avoir reproché à ceux-ci leur manque de bonne foi, il ajoute froidement : difficile autem inter eos invenitur bonus, tamen in multis pauci boni esse possunt ; p. 18.
  2. Il assure que les vices particuliers de tous les pays viennent se rassembler dans le cloaque de Carthage, l. VII, p. 257. Les Africains s’enorgueillissaient de leur vigueur dans la pratique du vice. Et illi se magis virilis fortitudinis esse crederant, qui maxime viros feminei usûs probositate fregissent, p. 268. On rencontrait dans les rues de Carthage de misérables débauchés qui affectaient le maintien, l’habillement et les manières des femmes (p. 264). Si un moine paraissait dans les rues, le saint homme était poursuivi par des insultes et des rires impies ; detestantibus ridentium cachinnis, p. 289.