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des Vandales réprima sévèrement les déréglemens de ce peuple voluptueux, et l’ancienne, noble et franche liberté de Carthage (telles sont les expressions assez énergiques de Victor) fut réduite en une servitude ignominieuse. Après avoir donné à ses troupes le loisir de satisfaire leur avarice et leurs fureurs, Genseric organisa un mode plus régulier d’oppression et de brigandage ; il ordonna, par un édit, que tous les habitans, sans distinction, remissent sans fraude et sans délai aux officiers préposés pour les recevoir, tout l’or, l’argent, les bijoux et les meubles précieux qu’ils pouvaient posséder ; ceux qui entreprenaient de se réserver en secret la plus faible partie de leur patrimoine, étaient irrévocablement livrés à la torture et à la mort, comme coupables de trahison envers l’état. Genseric fit mesurer avec soin et partager entre ses Barbares les terres de la province proconsulaire qui formait le district immédiat de Carthage, et conserva, comme son domaine particulier, le territoire fertile de Bysacium, et les cantons voisins de la Numidie et de la Gétulie[1].

Africains exilés et captifs.

Il était assez naturel que Genseric haït ceux qu’il avait offensés. La noblesse et les sénateurs de Carthage se trouvaient exposés à ses soupçons et à son ressentiment. Tous ceux qui se refusèrent aux conditions ignominieuses prescrites par un tyran arien, et que l’honneur ainsi que la religion leur défen-

  1. Comparez Procope (De bell. Vandal., l. I, c. 5, p. 189, 190) et Victor Vitensis, De persecut. Vandal., l. I, c. 4.