Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/257

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

le seul des conquérans anciens et modernes qui ait réuni sous sa puissance les vastes royaumes de la Scythie et de la Germanie ; et ces dénominations vagues, lorsqu’on les applique au temps de son règne, peuvent s’entendre dans le sens le plus étendu. Attila comptait au nombre de ses provinces la Thuringe, qui n’était bornée alors que par les rives du Danube. Les Francs le regardaient comme un voisin redoutable, dont ils respectaient l’intervention dans leurs démêlés intérieurs, et un de ses lieutenans châtia et même extermina presque entièrement les Bourguignons qui habitaient sur les bords du Rhin. Il avait soumis les îles de l’Océan et les royaumes de la Scandinavie, environnés et séparés par les eaux de la mer Baltique. Les Huns pouvaient tirer un tribut de fourrures de ces contrées septentrionales, défendues jusque alors contre l’avidité des conquérans par le courage des peuples et par la sévérité du climat. Du côté de l’orient, il est difficile d’assigner une limite à l’autorité d’Attila sur les déserts de la Scythie ; nous pouvons cependant affirmer qu’elle était reconnue sur les bords du Volga ; que ces peuples redoutaient le monarque des Huns comme guerrier et comme magicien[1] ; qu’il attaqua et vainquit le

  1. Voyez l’Histoire des Huns, t. II, p. 296. Les Geougen croyaient que les Huns pouvaient, quand ils le voulaient, faire tomber la pluie, exciter les vents et les tempêtes. On attribuait ce phénomène à la pierre gezi ; et les Tartares mahométans du quatorzième siècle attribuèrent la perte d’une bataille au pouvoir magique de cette