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des arts et des sciences que l’Italie avait communiqués aux Saxons qu’elle avait convertis : le pays de Galles et l’Armorique conservèrent et propagèrent la langue celtique, ancien idiome de l’Occident ; et les bardes, anciens compagnons des druides, ont encore été protégés, dans le seizième siècle, par les lois d’Élisabeth. Leur chef, officier respectable des cours de Pengwern, d’Aberfraw ou de Caermathaen, accompagnait à la guerre les domestiques du roi ; les droits des Bretons à la monarchie, qu’il chantait à la tête de l’armée, excitaient le courage des soldats et justifiaient leurs rapines ; et le chanteur avait droit, pour récompense, à la plus belle des génisses qui se trouvaient dans le butin. Les bardes inférieurs, dont les uns enseignaient, les autres apprenaient la musique vocale et instrumentale, visitaient successivement dans leur arrondissement les palais des rois, les maisons des nobles et celles des plébéiens, et fatiguaient de leurs demandes importunes des peuples déjà épuisés par les besoins du clergé. Les bardes subsistaient des examens, on fixait leur rang à raison de leur mérite, et l’opinion générale d’une inspiration surnaturelle excitait le génie de ces poètes et la confiance de leurs auditeurs[1]. L’extrémité sep-

  1. Le voyage de M. Pennant dans le pays de Galles (p. 426-449), m’a fourni une anecdote très-intéressante sur les bardes gallois. Dans l’année 1568, on tint à Caerwys une session par l’ordre spécial de la reine Élisabeth, et cinquante-cinq ménestrels y reçurent régulièrement leurs grades en musique vocale et instrumentale ; la famille de Mostyn, qui présidait, adjugea pour prix une harpe d’argent.