Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 7.djvu/239

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de ralliement, Nika (sois vainqueur), est devenu le nom de cette mémorable sédition[1].

Détresse de Justinien.

Tant que la discorde avait régné parmi les factions, les Bleus triomphans et les Verts découragés avaient paru voir les désordres de l’état avec la même indifférence. Elles se réunirent pour censurer la mauvaise administration de la justice et des finances, et les deux ministres qui répondaient des opérations du gouvernement. L’artificieux Tribonien, et l’avide Jean de Cappadoce, furent dénoncés hautement comme les auteurs de la misère publique. On aurait dédaigné les paisibles murmures du peuple ; mais on les écouta avec attention au moment où les flammes consumèrent la ville. L’empereur renvoya sur-le-champ le questeur et le préfet, qui furent remplacés par deux sénateurs d’une intégrité sans reproche. Après ce sacrifice fait à l’opinion publique, Justinien se rendit à l’Hippodrome pour y avouer ses erreurs, et recevoir des marques du repentir de ses sujets reconnaissans : mais voyant que ses sermens, quoique prononcés sur les saints Évangiles, laissaient encore de la défiance, la frayeur le saisit, et il gagna précipitamment la citadelle du palais. Alors on attribua l’opiniâtreté de l’émeute à une conspiration secrète dirigée par des vues ambitieuses : on crut que les

  1. Ce récit de la sédition Nika est tiré de Marcellin (in Chron.) ; de Procope (Persic., l. I, c. 26) ; de Jean Malala (t. II, p. 213-218) ; de la Chronique de Paschal (p. 336-340) ; de Théophane (Chronograph., p. 154-158), et de Zonare, l. XIV, p. 61, 63.