Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 7.djvu/24

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pu différer la publicité de sa conversion. La cérémonie fut exécutée dans la cathédrale de Reims avec toute la magnificence et la solennité capable de frapper l’esprit grossier de ces nouveaux prosélytes d’un profond sentiment de respect pour la religion[1]. Le nouveau Constantin fut baptisé sur-le-champ avec trois mille de ses belliqueux sujets. Leur exemple fut imité par le reste des dociles Barbares qui, d’après les ordres du prélat victorieux, adorèrent la croix qu’ils avaient brûlée, et brûlèrent les idoles qu’ils avaient adorées[2]. L’imagination de Clovis était susceptible d’une ferveur passagère ; le récit pathétique de la passion et de la mort de Jésus-Christ excita sa colère, et au lieu de réfléchir aux suites salutaires de ce mystérieux sacrifice, transporté d’une fureur inconvenante : « Que n’étais-je là ! s’écria-t-il, à la tête de mes braves Francs, j’aurais vengé son injure[3]. » Mais le conquérant sauvage des Gaules

  1. Une fiole d’huile sainte, ou plutôt céleste, connue sous le nom de sainte ampoule, fut apportée par une colombe blanche pour le baptême de Clovis. Elle sert encore, et se renouvelle au couronnement de tous les rois de France. Hincmar, qui aspirait à devenir primat des Gaules, est le premier auteur de cette fable, tom. III, p. 377. L’abbé de Vertot (Mém. de l’Acad. des inscript., t. II, p. 619-633) en attaque les fragiles fondemens avec un profond respect et une adresse admirable.
  2. Mitis depone colla, Sicamber : adora quod incendisti, incende quod adorasti. Saint Grégoire de Tours, l. II, c. 31, t. II, p. 177.
  3. Si ego ibidem cum Francis meis fuissem, injurias ejus