Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 7.djvu/330

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sans effusion de sang, s’il avait pu contenir l’impatience de ses troupes. Cette valeur dont elles s’étaient vantées se montra peu le jour de la bataille ; les Arabes chrétiens, par une lâche ou perfide défection, découvrirent l’aile droite ; les Huns, vieux corps de huit cents guerriers, furent accablés sous le nombre des assaillans ; les Isauriens furent coupés dans leur fuite ; mais l’infanterie romaine demeura inébranlable sur la gauche ; et Bélisaire, descendant lui-même de cheval, fit voir à ses soldats qu’il ne leur restait d’autre ressource que l’intrépidité du désespoir. Ils tournèrent le dos à l’Euphrate et le visage à l’ennemi ; des traits sans nombre vinrent frapper sans effet contre le rempart qu’offraient leurs boucliers serrés ; ils opposèrent une ligne impénétrable de piques aux assauts multipliés de la cavalerie persane ; et après une très-longue résistance, on mit habilement à profit les ombres de la nuit pour embarquer ce qui restait de troupes. Le général persan se retirant en désordre et avec ignominie, eut à rendre un compte sévère de la vie de tant de soldats qu’il avait sacrifiés à un succès inutile. Mais la gloire de Bélisaire ne fut point ternie par une défaite, où seul il avait soustrait ses troupes aux suites de leur témérité. Les approches de la paix le délivrèrent de la garde de la frontière d’Orient, et la manière dont il se conduisit lors de la sédition de Constantinople, l’acquitta complètement envers l’empereur. Lorsque la guerre d’Afrique devint le sujet des entretiens populaires et des délibérations du conseil, chacun des