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généraux romains craignait plutôt qu’il n’ambitionnait le dangereux honneur de la diriger ; mais lorsque, déterminé par la supériorité du mérite, Justinien eut nommé Bélisaire, leur jalousie fut promptement rallumée par l’applaudissement général qu’excita ce choix de l’empereur. Les habitudes de la cour de Byzance permettent de soupçonner que les droits du héros furent secrètement appuyés des intrigues de sa femme, la belle et adroite Antonina, qui tour à tour obtenait la confiance et encourait la haine de l’impératrice Théodora. Antonina était d’une naissance obscure ; elle descendait d’une famille de conducteurs de char, et son inconduite lui mérita les plus honteux reproches. Toutefois elle exerça longtemps un empire absolu sur son illustre époux ; et si elle dédaigna le mérite de la fidélité conjugale, elle donna de grandes preuves d’une mâle affection à l’époux qu’elle eut le courage de suivre au milieu de toutes les fatigues et de tous les dangers de ses expéditions[1].

Préparatifs de la guerre. A. D. 533.

Rome allait lutter pour la dernière fois contre Carthage, et les préparatifs de la guerre d’Afrique ne furent pas indignes de cette grande querelle. Les gardes de Bélisaire, qui, selon le pernicieux usage toléré en ce temps-là, faisaient à leur chef un serment de fidélité particulier, composaient l’élite et faisaient l’orgueil de l’armée. Ils étaient tous remarquables par une force et une stature peu communes ;

  1. Voyez la naissance et le caractère d’Antonina dans les Anecdotes, c. 1, et les Notes d’Aleman., p. 3.