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Clovis observait dans la distribution des dépouilles. Son devoir et son intérêt l’obligeaient de pourvoir aux récompenses d’une armée victorieuse et à l’établissement d’un peuple nombreux, sans exercer une tyrannie atroce et inutile contre les catholiques de la Gaule qui lui étaient affectionnés. L’acquisition légitime du patrimoine impérial, des terres vacantes et des usurpations des Goths, diminuait la nécessité des confiscations, et les humbles habitans devaient supporter plus patiemment leurs pertes lorsqu’ils voyaient distribuer leurs dépouilles avec égalité[1].

Domaines et bénéfices des Mérovingiens.

La richesse des princes Mérovingiens consistait dans l’étendue de leurs domaines. Après avoir conquis la Gaule, ils conservèrent la simplicité rustique de leurs ancêtres. Les villes dépeuplées tombaient en ruines ; et leurs monnaies, leurs chartres et leurs synodes portent le nom de quelqu’une des maisons de campagne ou des palais agrestes qu’ils habitaient successivement. On comptait dans les différentes provinces qui composaient le royaume, cent soixante de ces habitations appelées palais, nom auquel il faut se garder, dans cette occasion, d’attacher aucune

  1. Il est assez singulier que le président de Montesquieu (Esprit des Lois, l. XXX, c. 7), et l’abbé de Mably (Observat., t. I, p. 21, 22), adoptent l’un et l’autre l’étrange supposition d’une rapine arbitraire. À travers son ignorance et ses préjugés, le comte de Boulainvilliers (État de la France, t. I, p. 22, 23) laisse entrevoir une grande force de jugement.