Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 7.djvu/65

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idée de luxe ou d’élégance. Quelques-uns pouvaient être honorés du titre de forteresses ; mais la plupart n’étaient que de riches fermes environnées de basses-cours et d’étables pour nourrir des volailles et enclore des troupeaux. Les jardins ne contenaient que des végétaux utiles ; et des mains serviles exerçaient divers commerces, les travaux de l’agriculture et même la pêche et la chasse au profit du souverain. Leurs magasins étaient remplis de blés et de vins ; ils vendaient le surplus de leur consommation ; et toute l’administration se conduisait d’après les plus sévères maximes de l’économie domestique[1]. Ces vastes domaines fournissaient à l’abondance de la table hospitalière de Clovis et de ses successeurs, et leur donnaient les moyens de récompenser la fidélité des braves compagnons attachés, en paix comme en guerre, à leur service personnel. Au lieu d’un cheval ou d’une armure, chaque compagnon recevait à raison de son rang, de son mérite ou de la faveur du prince, un bénéfice, nom primitif des possessions féodales et qui désignait leur forme la plus simple. Le souverain pouvait toujours le re-

  1. Voyez l’édit ou plutôt le code rustique de Charlemagne, qui contient soixante-dix règlemens (t. V, p. 652-657). Il exige le compte des cornes et des peaux de ses chèvres ; il permet que l’on vende son poisson, et ordonne soigneusement qu’on nourrisse dans chacun de ses plus grands manoirs, capitaneæ, cent poules et trente oies, et dans les plus petits, mansionales, cinquante poules et douze oies. Mabillon (De re diplomaticâ) a fait connaître les noms, le nombre et la situation des manoirs mérovingiens.