Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 7.djvu/80

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noms d’humeur pacifique et d’urbanité, se trouvaient naturellement obligés de se soumettre aux armes et aux lois des Barbares féroces qui se jouaient dédaigneusement de leurs propriétés, de leur vie et de leur liberté ; du reste, ces injustices étaient personnelles et illégales, et le corps des Romains survécut à la révolution. Ils conservèrent toujours les propriétés et les priviléges de citoyens. Les Francs envahirent une partie de leurs terres, mais celles qui leur restèrent furent exemptes de tributs[1] ; et la violence qui détruisit les arts et les manufactures de la Gaule, anéantit aussi tout le système du despotisme impérial. Les anciens habitans de la Gaule déplorèrent souvent sans doute la jurisprudence sauvage des lois saliques et ripuaires ; mais le code de Théodose régla toujours leurs mariages, leurs testamens et leurs successions ; un Romain mécontent de sa situation pouvait aspirer ou descendre au rang des Barbares, et prétendre encore à toutes les dignités de l’état : le caractère et l’éducation des Romains les rendaient propres surtout aux fonctions du gouvernement civil ; mais dès que l’émulation eut ranimé leur ardeur militaire, on les reçut dans les rangs et même à la tête des victorieux Germains. Je n’essaierai point de calculer le nombre des généraux et des magistrats dont les noms[2] attestent la poli-

  1. L’abbé de Mably (t. I, p. 247-267) a confirmé avec soin cette opinion du président de Montesquieu, Esprit des Lois, l. XXX, c. 13.
  2. Voyez Dubos, Hist. crit. de la Monarch. franc., t. II,