Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 8.djvu/25

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fices et égorgèrent les habitans ; ils traversèrent hardiment l’Hellespont, et retournèrent ensuite auprès de leurs camarades, chargés des dépouilles de l’Asie. Un autre détachement, qui parut aux Romains une horde effrayante, s’avança sans trouver d’obstacles du passage des Thermopyles à l’isthme de Corinthe, et l’histoire n’a pas daigné recueillir le détail de l’événement qui acheva la ruine de la Grèce. Les ouvrages que fit élever Justinien pour protéger ses sujets, mais à leurs dépens, ne servirent qu’à faire remarquer la faiblesse des parties qui demeurèrent négligées ; et les garnisons abandonnaient ou les Barbares escaladaient les murs que la flatterie disait imprenables. Trois mille Esclavons, qui eurent l’insolence de se diviser en deux troupes, découvrirent la faiblesse et la misère de ce règne triomphant. Ils passèrent le Danube et l’Hèbre, ils vainquirent les généraux romains qui osèrent s’opposer à leur marche, et ils pillèrent impunément les villes de la Thrace et de l’Illyrie, dont chacune avait un assez grand nombre d’armes et d’habitans pour accabler cette misérable troupe d’assaillans. Quelques éloges que puisse mériter cette audace des Esclavons, elle fut souillée par les cruautés qu’ils commirent de sang-froid contre leurs prisonniers. On dit que sans distinction de rang, d’âge et de sexe, ils empalaient leurs captifs ou les écorchaient vifs ; qu’ils les suspendaient entre quatre poteaux où ils les faisaient mourir à coups de massue ; qu’ils les enfermaient dans des bâtimens spacieux, et les y laissaient périr dans les flammes avec