Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 8.djvu/40

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

d’un travail admirable, monument de la valeur des Turcs plutôt que de leur industrie. Lorsque Disabul marcha à la tête de ses armées vers la frontière de la Perse, les envoyés romains suivirent le camp des Turcs durant plusieurs jours, et on ne les renvoya qu’après leur avoir accordé la préséance sur un ambassadeur du grand roi, dont les clameurs immodérées interrompirent le silence du banquet royal. La puissance et l’ambition de Chosroès cimentèrent l’union des Turcs et des Romains, situés des deux côtés sur les confins de ses états ; mais ces nations éloignées écoutèrent bientôt leurs intérêts particuliers sans se souvenir de leurs sermens et de leurs traités. Tandis que le successeur de Disabul célébrait les obsèques de son père, il reçut les ambassadeurs de l’empereur Tibère, qui venaient lui proposer d’envahir la Perse, et soutinrent avec fermeté les reproches violens et peut-être justes de cet orgueilleux Barbare. « Vous voyez mes dix doigts, leur dit le khan en les appliquant sur sa bouche ; vous autres Romains, vous avez un aussi grand nombre de langues ; mais ce sont des langues de tromperie et de parjure. Vous me tenez un langage, et vous en tenez un autre à mes sujets ; et chaque nation est trompée tour à tour par votre perfide éloquence. Vous précipitez vos alliés dans la guerre et dans les périls ; vous jouissez de leurs travaux, et vous négligez vos bienfaiteurs. Retournez promptement chez vous, et dites à votre maître qu’un Turc est incapable de proférer et de pardonner un mensonge ; et qu’il recevra